My loneliness is so large It has outgrown meIt walks beside meA wasteland that keeps in stepA new and strange stretch of desert O highway I travel, do you say to me (…)O public road I say back I am not afraid to leave you yet I love youYou express me better than I can express myselfVol Lufthansa 427
L’Amérique était proche. Plusieurs dizaines de compa-
gnies pour e^ectuer le voyage, quelques cacahuètes, des
boissons au compte-gouttes, un ou deux repas préembal-lés et des films dont on ne se rappelait que rarement. On ne risquait plus de mourir du scorbut, ou, arrivé aux limi-tes du monde, de tomber dans le vide. A présent, on cares-
sait les limites de la troposphère en position assise, dans un inconfort constant et le partage imposé d’un espace li-
mité, avec, tout au plus, la crainte di^use de la thrombose veineuse profonde.
Dans l’avion, Sonny se retrouva assis à quelques rangées
derrière deux parents très nerveux à l’idée que leurs en-
fants dérangent les autres passagers. Les enfants n’avaient apparemment pas l’air intéressé par leurs écrans LCD ; les parents étaient contraints de trouver autre chose : ils alter-naient donc tentatives de diversion et consignes de silence. La tension imprégnait leurs voix mal contenues et se pro-pageait sous la forme d’un nimbe de vibrations négatives le long de l’habitacle.
De l’autre côté du couloir, un type lisait le Men’s Health,
édition française, qui contenait un dossier sur « un été in-
telligent ». Il avait une chemise rose pâle parfaitement re-passée, un début de calvitie et l’air d’être totalement imper-méable à tout ce qui l’entourait. Il mâchait un chewing-gum, lentement, posément, en crispant ses mâchoires toutes les
cinq ou six secondes, les yeux fixés avec concentration sur
son enquête. Il regarda soudain sa montre, avant de pren-dre un paquet bleu et blanc de « nico quelque chose » dans la poche de sa chemise et d’en sortir un nouveau chewing-gum qu’il enfila avec nonchalance entre ses lèvres.
¬ Je crois que le voyage risque d’être long, dit le voisin
de Sonny, alors que l’Atlantique était en vue et que le gron-dement parental atteignait un nouveau seuil. J’espère que ces mômes vont se calmer.
¬ Je déteste les enfants, continua le voisin. Spécialement
sur les vols long-courriers. J’ai l’impression que chaque fois que je prends l’avion, je suis assis à proximité d’enfants en bas âge. Je me demande pourquoi des parents s’entêtent à
faire des voyages de huit ou dix heures avec des mioches… Des fois, je me dis qu’il y a des parents qui cherchent à se prouver que leur vie n’a pas changé…
¬ Peut-être, lâcha Sonny. ¬ Vous avez des enfants ?
Sonny mentit et lui renvoya la question. Le type eut une
grimace qui oscillait entre l’écœurement et l’amusement.
¬ Quand je suis avec une femme, je n’ai pas envie de lui
faire des enfants, si vous voyez ce que je veux dire.
Il fit un clin d’œil à Sonny. Les hôtesses passèrent dans
les couloirs, distribuant écouteurs et coussins.
¬ Vous allez où ? demanda le type. ¬ Los Angeles.
¬ La Californie. La terre des opportunités, du soleil et
d’un été qui dure 365 jours par an… Les filles sont trop ma-quillées et elles ont des seins en baudruche. C’est le para-dis du plâtre. Vous avez déjà été en Californie ?
¬ Alors, vous voyez ce que je veux dire… Je n’aime pas
beaucoup les Américaines. Elles sont trop superficielles, trop artificielles. Elles ont une attitude trop ambiguë.
¬ Par rapport à quoi ?¬ A beaucoup de choses. A tout. Elles ont tendance à être
Sonny lui demanda qui il préférait, s’il n’aimait pas les
La réponse avait été immédiate et les yeux du voisin
avaient pris le départ pour la contemplation de souvenirs immensément soyeux.
¬ J’apprécie les Japonaises, mais c’est di·cile, ajouta-
t-il néanmoins après quelques secondes.
Sonny voulut savoir ce qu’il voulait dire par là. Appa-
remment les Occidentaux n’avaient pas le mode d’emploi
complet pour accéder aux tréfonds de l’âme féminine ja-
ponaise. Le mâle occidental sou^rait d’une déficience de
compréhension qui ressemblait fort à une inaptitude fon-damentale, une sorte de trou dans la logique.
¬ Et donc vos rapports avec les Japonaises ont été un
Le voisin jeta un coup de sonde oculaire droit sur
¬ Elles vous ont déçu ? insista Sonny. ¬ On peut dire ça comme ça, dit le voisin en détournant
Il s’ensuivit un silence embarrassé. Sonny essaya de
rallumer la conversation en posant des questions plus gé-nérales sur le Japon. La discussion repartit, un peu bran-lante, avant de s’étioler définitivement. Le voisin préférait
se concentrer sur son écran personnel. Sonny se rabattit sur
l’appareillage audio et ses programmes consensuels aux li-mites de l’audible.
Derrière le hublot, le ciel était vide. D’en bas, l’avion de-
vait laisser une trace de pneu blanche dans l’azur. Le mou-vement des nuages l’attirait. C’était comme une drogue, ir-résistible, se faire avaler par les couleurs, se dissoudre dans
le bleu, disparaître en rose, crever au cœur du rouge du cou-chant. Sonny aurait aimé qu’il fasse nuit pour toucher du doigt les étoiles, il aurait voulu se noyer dans le ciel. Il était prêt à se jeter hors de la carlingue, flotter, partir très loin.
A l’approche de Washington, l’avion survola une ban-
lieue qui se déroulait, quartiers pavillonnaires, entrelacs de routes qui n’en finissaient pas, pelouses que l’on devi-nait manutentionnées avec soin, un endroit sur mesure pour Candice Rotenberg. Le tout formait un dessin géné-ral abstrait, une succession de droites, de courbes et de po-lyèdres qui se propageaient à perte de vue ; les plans d’une civilisation qui s’était installée sans qu’on ait vraiment eu le temps de la voir venir et qui avait toutes les caractéristi-ques d’une évidence incontestable, d’un horizon indépas-sable. Comment avait-on fait pour vivre pendant tous ces siècles sans arrosage automatique ? Comment en était-on arrivé là ? Et au fait, où se trouvait-on ? C’était à cela qu’as-pirait l’humanité : le bien-être individuel tenant à la fois du supermarché de la fuite en avant et de la quête du Grand
Au-Delà ; une maison avec jacuzzi privatif, des divertisse-ments audio-visuels, des sports à pratiquer intensivement,
une consommation compensatoire, une gamme complète de médicaments contre la douleur et tout un Disneyland hormonal de produits destinés à ralentir le temps. Colgate, prozac, autobronzants et une saine vie de famille. A se de-
mander si, à force de vouloir échapper momentanément au stress induit par la survie économique et sociale, on ne visait pas l’utilisation unique du cerveau comme gestion réflexe des fonctions vitales.
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Toolkit for Creating Inclusive, Learning-Friendly EnvironmentsThe education of children with diverse backgrounds and abilities remains amajor challenge in the Asia-Pacific region. In April 2000, the World EducationForum held in Dakar, Senegal, set as its second goal: “ensuring that by2015 all children, particularly girls, children in difficult circumstances andthose belonging to ethnic minoriti